Chaque année, et depuis 47 ans déjà, une retraite d’un mois sur l’enseignement du Lam-Rim est organisée au Monastère de Kopan, à Katmandou au Népal. Le Lam-Rim « la voie graduée vers l’éveil » est un enseignement qui remonte au moine Bouddhiste Indien Atisha né en 982 av. Il rédigea les premiers textes sur l’étape de la voie « La lampe sur la voie de l’éveil ». Le Lam-rim regroupe l’ensemble des étapes permettant d’accéder à l’éveil tel que l’a enseigné le Bouddha.
Le monastère de Kopan dépend de la branche Gelugpa du bouddhisme Mahayana. Grâce à cette lignée ininterrompue de grands maîtres, comme Nagarjuna, en passant par Atisha et Lama Tsongkhapa puis celle de tous les Dalaï-Lama jusqu’à aujourd’hui, l’enseignement a conservé toute sa pureté. C’est donc une chance inouïe de pouvoir recevoir un enseignement de cette qualité encore aujourd’hui. Lama Zopa Rinpoche est le directeur de la Fondation pour la Préservation de la Tradition du Mahayana (FPMT).
Le monastère de Kopan est situé à 40 minutes de marche du quartier de Bouddhanath (emplacement du grand Stupa) dans la ville de Katmandou. Le monastère est perché au sommet d’une colline surplombant la ville. L’endroit est agréable et éloigné de la pollution de la ville. Il y a quelques espaces verts fort agréables, où l’on peut se reposer, méditer ou alors tout simplement profiter de la chaleur du soleil.
La retraite Lam-Rim est annuelle et elle débute au début du mois de novembre pour une durée de 30 jours. Il y a environ 250 participants, tous venus des quatre coins de la planète, de tout âge et de toute religion.
Lama Zopa Rinpoche et Lama Yeshe (décédé en 1984) ont été parmi les premiers maîtres à enseigner le bouddhisme Tibétain aux occidentaux. Les premiers élèves du monastère de Kopan furent, pour la plupart, des hippies occidentaux en quête de spiritualité ou à la recherche d’expériences psychédéliques…
Et voilà que depuis 1967, chaque année, des gens s’installent pour un mois à Kopan pour suivre cette retraite. Les conditions ont bien changées et sont passées de simples tentes, éparpillées sur la colline, à des chambres confortables, allant du simple dortoir à la chambre privée de luxe avec salle de bain (nouvellement construites)!
Le prix de la retraite est de 500 $US pour le mois, ce qui comprend l’hébergement en dortoir et la nourriture (pour l’enseignement, des donations sont possibles et bien venues à la fin de la retraite). Le prix peut augmenter selon le type d’hébergement choisi. Pendant les 20 premiers jours, trois repas végétariens sont servis et, les 10 derniers jours, lors de la prise des 8 préceptes du Mahayana, plus qu’un seul repas par jour est servi.
Dès le mois de novembre, il peut vite faire froid durant la nuit et tôt le matin. Il faut donc se préparer à avoir froid dans les chambres et la Gompa (le monastère) car il n’y a pas de chauffage. Des habits chauds sont vivement recommandés pour bien se protéger du froid. Malheureusement, cette année, après deux semaines de cours, un grand nombre de personnes étaient malades et, malgré les recommandations, c’est chaque année ainsi.
Durant la retraite, la journée est divisée en plusieurs sessions allant de l’enseignement du Lam-Rim, à des séances de méditation, puis à des discussions en groupe sur des thèmes précis de l’enseignement, en passant par des pratiques spécifiques comme des prières ou des récitations des mantras, sans oublier les pauses repas et thé. Une journée débute vers 6h du matin et se termine à 21h et il n’y a pas de jours de congé !
Cette année (2014), l’enseignement du Lam-Rim a été présenté par le vénérable Gyatso, d’origine australienne, ancien hippie, puis médecin, est devenu moine bouddhiste quelques années après sa première retraite à Kopan, dans les années septante. C’est une personne très touchante qui, par sa grande connaissance et son expérience dans le domaine, nous a donné un enseignement de qualité et très détaillé (de manière très scientifique quelque fois), avec quelques pointes d’humour qui soulageait nos esprits submergés par la quantité d’informations reçues.
Les 12 derniers jours de la retraite, c’est Lama Zopa Rinpoche lui-même qui a donné des enseignements, de manière alternée avec le vénérable Gyatso. Lama Zopa Rinpoche est un grand maître très reconnu. Il est la réincarnation du grand yogi Kunsang Yeshe qui a passé sa vie à méditer dans une grotte au fin fond de l’Himalaya.
Ces enseignements sont très particuliers, spontanés et ils peuvent durer des heures, ce qui peut s’avérer difficile intellectuellement et physiquement (il faut préciser que, pour la plupart, l’on est assis par terre, sur les coussins de méditation). L’enseignement de Lama Zopa Rinpoche est d’une clarté surprenante, c’est à dire que les mots qu’il utilise sont simples et précis. Il rigole souvent et cela permet de bien détendre l’atmosphère et donne cette impression de « ne pas être trop sérieux ».
Et que ce soit Lama Zopa Rinpoche où le vénérable Gyatso, on ressent cette immense générosité venant de leur part à vouloir nous transmettre le maximum d’informations possibles sans aucune attente et sentiment de supériorité. C’est très touchant d’être en contact direct avec cette sagesse car cela prouve bien que nous pouvons tous développer cette qualité en nous. Ces grands maîtres sont des êtres humains comme nous tous.
Les sujets principaux de l’enseignement du Lam-Rim sont l’impermanence et la mort, le processus de la mort, les royaumes des renaissances, la prise du refuge, le Karma et la loi des causes et effets, les 4 nobles vérités, la roue de la vie et le Samsara, la Boddhicitta, la vacuité et le calme mental.
Pour mettre les enseignements reçus en pratique, Il y a quotidiennement deux séances de méditations guidées. C’est une bonne manière de familiariser son esprit à vivre certaines situations précises. C’est ce que l’on appelle dans le bouddhisme Tibétain la méditation analytique.
Le contenu de l’enseignement est impressionnant à tel point qu’il est très difficile de tout assimiler intellectuellement. Les sujets sont vastes et profonds à la fois. Il faut se laisser du temps pour le digérer et revoir certaines parties plus en profondeur. La chose la plus importante, c’est de mettre en pratique cet enseignement dans la vie de tous les jours. En un mois, il y a suffisamment d’informations et de techniques transmises pour pouvoir se mettre à la tâche le plus rapidement possible. Comme le disent les enseignants, c’est une chance incroyable de pouvoir découvrir et étudier le Dharma (l’enseignement du Bouddha). Selon la vue bouddhiste, la vie humaine est très précieuse et il serait dommage de ne pas utiliser chaque moment de cette vie à l’étude du Dharma afin d’atteindre l’éveil complet et de guider, à notre tour, tous les êtres à se libérer du cycle infernal des renaissances (le Samsara).
Cette année, Lama Zopa Rinpoche a insisté à plusieurs reprises sur le thème de la vacuité. C’est un sujet complexe qui n’est pas évident à comprendre intellectuellement et encore moins à réaliser (la réalisation de la vacuité est un but en soi dans la tradition Mahayana). Le fait que notre esprit perçoit tous les phénomènes comme existant de leur propre côté et de manière indépendante est une simple hallucination ou une vue erronée. C’est ce que l’on appelle l’ignorance qui est la cause même de toutes nos souffrances nous propulsant dans le Samsara depuis des temps sans commencement. Seule la réalisation de la vacuité (par la méditation) permet à l’esprit de voir que tous les phénomènes sont simplement désignés par l’esprit et qu’ils n‘existent pas de manières inhérentes. Selon l’enseignement du lam-rim les phénomènes sont donc vides d’existences propres. Une fois que cette vérité nous apparaît, il n’y a plus de saisie possible, donc plus d’attachement et, par conséquent, aucune élévation des perturbations mentales ne peut se produire dans notre esprit, c’est le chemin vers la libération.
L’enseignement par un maître qualifié s’est avéré bien plus efficace que la lecture de livres sur le sujet de la vacuité. L’expérience me montre que nous devrions plus souvent assister aux enseignements des grands maîtres. Leurs présences sont très bénéfiques pour notre propre compréhension. Quelque chose se passe dans ces moments d’écoute et non pas à la simple lecture de livre (ou différemment).
Un mois de cours à Kopan permet d’approcher le Bouddhisme Tibétain de manière intense. Il ne faut pas de connaissances préalables pour suivre cette retraite. L’environnement est également important et c’est pour cela que le monastère de Kopan est idéal pour l’étude du Lam-Rim. Le silence est maintenu pendant une partie de la journée et c’est ainsi dans cette tradition. Il y a quelques règles à suivre durant la retraite mais il est probablement difficile de les faire respecter aux 250 personnes présentes et éparpillées sur tout le site. Ce n’est donc pas une retraite de silence (sachez-le !) et malgré les règles à respecter, certaines personnes s’autorisent quelques libertés qui pourrait transformer tous leurs mérites accumulés en karmas négatifs !
Une expérience comme celle-ci ne peut-être que bénéfique aux êtres humains. C’est une très grande opportunité pour celles et ceux qui souhaitent comprendre le fonctionnement de l’esprit et qui cherchent des solutions pour ne plus nuire aux êtres (à soi et aux autres) par des actions non-vertueuses, que ce soit par le corps, la parole ou la pensée. C’est le chemin vers la transformation, vers la connaissance, qui permet de nous libérer de la souffrance et de tous ces karmas négatifs accumulés depuis des temps sans commencement.
Je recommande cette expérience à tout un chacun, elle en vaut vraiment la peine. Il ne faudrait jamais repousser cette occasion d’étudier le Dharma car la vie d’un être humain n’est pas éternelle.
Pour celles et ceux qui s’intéressent au Lam-Rim, en voici un, traduit en français : « Les étapes de la voie vers l’éveil » avec un commentaire du LamRim Tchenmo de Tsongkhapa, tome 1 & 2 », qui est actuellement la référence en la matière.